Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Fictions Lesbiennes :)
Fictions Lesbiennes :)
Publicité
Newsletter
7 novembre 2012

Chapitre 10

Mika arrête la voiture et me demande pour la millième fois environ :

-          T’es sûre que tu veux pas que je t’accompagne ?

-          Oui, je suis sûre, je vais y aller comme une grande fille, toute seule. Je lui dois bien ça.

Il acquiesce d’un signe de tête et me questionne :

-          Tu sais déjà ce que tu vas lui dire ?

Je hausse les épaules, me mordant l’intérieur des joues.

-          Pas la moindre idée… Je suis ouverte aux suggestions !

-          Tu comptes parler d’Erin et toi ?

Un large sourire pervers se dessine sur son visage et il ose même faire des mouvements de sourcils.

-          Arrête d’imaginer !

-          Trop tard !

-          Je suis ta cousine !!!!

-          Elle non !

Rahhh il m’énerve !

Je l’entends rigoler tandis que je boude, affalée dans le fond du siège. Je mets ma tête en arrière, contre l’appui-tête et lance :

-          En même temps, je sais même pas s’il y’a un Erin et moi.

-          Comment ça ? D’après ce que tu as insinué, et ce malgré le honteux manque de détails, c’est plutôt clair qu’elle t’aime plus que bien et c’est visiblement réciproque.

Je me passe les mains sur le visage. Il n’a pas tort sur ce point-là mais… Je suis pas sûre d’être prête à assumer. J’en ai envie mais j’en ai peur. Et là je suis à un stade où je peux toujours mettre ce qui s’est passé sur le compte d’une folie passagère. Enfin de folies à répétition. Ma mauvaise foi n’a pas de limites !

Du coup, l’idée c’est de ne pas y penser et de repousser au maximum le moment où j’en parlerai avec Erin. Je réponds aux textos de manière amicale et tout ce que j’ai envie de dire qui dépasse du cadre, je le garde pour moi. Mais je ne sais pas combien de temps je vais pouvoir continuer comme ça, plus je la fuis, pire c’est.

Je soupire et me penche pour lui faire un bisou.

-          Je t’appelle dès que j’ai fini.

-          Ça marche.

J’ouvre la portière et mon cousin me lance un :

-          Merde !

-          C’est gentil.

Je sors et vais jusqu’à l’appart au radar. Arrivée devant la porte, je toque. J’ai les clés mais je ne me sens pas de les utiliser. J’ai l’impression que je poireaute des plombes, là, debout l’air bête à jouer avec ma chaine pour me donner une contenance. Finalement, Julien m’ouvre. Il a l’air surpris de me voir et il ne ressemble pas à grand-chose.

-          Oh, salut ! Je ne m’attendais pas à te voir ! Entre, je t’en prie.

Je lui fais un sourire et passe à côté de lui. Il ferme la porte derrière moi et je regrette d’être venue même s’il le fallait. C’est trop tôt, tout va trop vite pour moi en ce moment, j’aimerais bien retrouver un semblant de contrôle.

-          Ça va ?

C’est plus une question rhétorique qu’autre chose, vu sa tête ça ne va pas franchement. Ne sachant pas quoi en faire, je mets mes mains dans mes poches et me balance un peu. 

-          Pour être honnête, j’ai connu mieux.

Il s’affale sur le canapé tandis que je reste debout.

Je sais pas quoi dire, c’est horrible. Un long silence totalement inconfortable

Finalement, c’est lui qui prend la parole :

-          C’est vraiment terminé hein ?

Je baisse la tête. À son ton il connait déjà la réponse.

-          Je peux juste savoir pourquoi ?

Je ne peux pas lui dire que je suis attirée et obnubilée par quelqu’un d’autre, qui en plus se trouve être une femme… Alors j’opte pour l’autre partie de la vérité :

-          Mes sentiments pour toi ont changé… Je suis désolée.

 

* * * * *

 

Bien qu'on ait échangé des messages relativement courtois depuis, je n'ai pas vu Erin depuis notre « dispute ». Je suis nerveuse et je me demande comment je vais lui dire bonjour. La fois d’avant, étant donné qu’elle était fâchée, on s’est même pas salué à proprement parler, comme ça c’était réglé. Et oui, c'est pour ça que je suis plantée devant la porte du bureau, la main sur la clenche. Sentant que j'attire l'attention, je finis par entrer.

Erin est avec un élève que je reconnais des exams l'année dernière. Ironiquement, il m'a marquée parce que je n'avais jamais vu sa tête avant. Apparemment, son niveau d'implication a augmenté !

Ma collègue me fait un sourire radieux, comme si elle avait oublié à quel point j’ai été incorrecte avec elle et d'un geste de la main, m'indique de m'approcher. Je m’exécute et lui fais la bise, sûrement plus lentement que je ne devrais. À vrai dire, ça me fait super bizarre après ce qui s’est passé entre nous. C’est la première fois que je reviens dans le bureau depuis… l’incident.

L'élève, Benjamin me semble-t-il, me regarde d'un drôle d'air.

Peut-être qu'il est juste deg !

Je souris en pensant ça et vais me placer derrière mon bureau pour travailler. Mes yeux n'ont visiblement pas compris le concept puisqu'un millième de seconde plus tard, ils viennent caresser Erin.

Amies on a dit.

Calme-toi.

Secouant la tête, je mets de l'ordre dans les stylos de mon pot à crayons, souriant en repensant à la raison qui fait qu'ils se sont trouvés par terre à la base. Elle a dû les ramasser...

Concentre-toi un peu !

Je remue une nouvelle fois la tête, comme le ferait un bovin qui veut se débarrasser d'une mouche. Et la réalité est beaucoup plus plaisante que l'exemple.

Finalement, je me constitue un H en trombones, pour me rappeler qu'au boulot, il faut que je pense Hétéro, avec un grand H.

Sauf que je viens de remarquer qu'Homo commence aussi par un H.

Bref.

Benjamin (ou quel que soit son nom)  raconte sa vie à ma collègue qui l'écoute patiemment.

Argh, je suis sûre qu'il est là pour la draguer ! J'ignore la ridicule vague de jalousie qui s'empare de moi. Après tout, qui pourrait le blâmer. Elle m'a fait changer de bord, pas étonnant que ceux déjà de ce côté de la barrière tentent leur chance.

Oubliant toute bonne résolution, mes yeux la parcourent sans retenue. Étant donné que mon bureau est placé perpendiculairement au sien et un peu en retrait, tout va bien, Benjamin n'en saura rien.

Erin porte une chemise manches courtes noire, ouverte juste ce qu'il faut pour faire saliver. Ses doigts jouent machinalement avec la fine chaine d'argent qu'elle a autour du cou. Je l'imagine me fixant droit dans les yeux, et la déboutonnant pour moi...

Péniblement, je parviens à regarder ailleurs. Mais j’ai parfaitement conscience du fait qu’elle est là et que je crève d’envie de l’observer. C’est beaucoup plus dur que je ne l’aurais cru. Résister à l’évidente attirance que j’ai pour elle, à tout ce que j’ai envie de lui faire, à la simple pensée d’être avec elle à nouveau… C’est un supplice.

Mon regard se pose sur le H en trombones, qui semble me narguer. Agacée, je le détruis d'un mouvement de la main et attrape dans mon sac le classeur qu'il me faut.

Allez, un dernier coup d'œil et je m'y mets.

Oh. Mon. Dieu.

Je regrette que notre vision n'ait pas de fonction zoom lorsque je la vois, stylo aux lèvres. J'arrive à deviner sa langue qui joue distraitement avec le bout de ce qui est le plus chanceux stylo  au monde. Et vu qu’il fixe également sa bouche, ce n'est pas Benjamin qui me contredira !

Amies on a dit !

Erin semble quant à elle complètement innocente et n'a pas l'air d'avoir remarqué notre émoi. J’aimerais avoir cet effet sur elle.

Enfin s’il faut, je l’ai et je l’ignore !

Cette idée m’en donne une autre, que je n’arrive pas non plus à déloger…

Je souris toute seule et hésite… Avant d’attraper mon téléphone. Quelques secondes plus tard, la vibration indiquant un nouveau message se fait clairement entendre dans le bureau autrement silencieux.

Mon cœur bat la chamade, j’ai vraiment peur de sa réaction.

Ma collègue s'excuse, saisit son propre smartphone et lit mon texto, celui-là même où il est écrit noir sur blanc "J'ai beau tenter de lutter, rien à faire, j’ai envie de toi...". Ses yeux s'écarquillent une seconde, puis semblent relire et me fixent d'un air incrédule.

C'est la première fois que je suis aussi directe avec elle. D’ailleurs, ça doit sûrement être la seule occasion où je l’ai clairement avoué.

Pour toute réponse, je lui fais un sourire en coin et hausse un sourcil, l'air de dire "t'en dis quoi ?". Inutile de faire marche arrière, ma volonté est inexistante aujourd’hui.

Reconnaissant un challenge quand elle en voit un, elle commence à me répondre et est interrompue par Benjamin qui lui demande :

-          Un message de votre petit ami ?

Pendant un instant, j'ai peur qu'il ait réussi à lire et tous mes doutes reviennent vitesse grand V, puis je réalise qu'il fait de la pêche aux infos.

N'empêche qu'il n'est pas le seul à vouloir connaitre la réponse. Peut-être que ça m’aiderait à savoir ce que je veux. Parce que si j’arrive à être raisonnable à distance, ça change radicalement dès qu’elle est dans la pièce.  C’est pour ça que le plan « je l’évite à vie » était pas si mal !

Erin lui fait un sourire qui, s'il m'était adressé, rendrait le port de sous-vêtements inconfortable et réplique d’un ton suave :

-          Ça, j’ai peur que ça ne te regarde pas !

Rabat-joie !

Mon téléphone vibre et je réalise qu'elle a répondu.

Benjamin, que visiblement rien n'arrête, en rajoute une couche.

-          En tout cas si c'est le cas, il a beaucoup de chance.

Est-ce que je finirais en prison si je lui fais un accidentel coup du lapin en lui lançant mon agrafeuse à l'arrière du crâne ?

Blasée, je retiens le "pffft" que j'ai envie de lâcher et lis mon sms, tandis qu'il tend un papier à une Erin gênée. Sûrement un poème d'amour d'ailleurs !

Je crois que tu as fait tomber un trombone.

Quoi ?

Mais de quoi elle parle ?

Je l’observe et suis accueillie par un sourire en coin.

Ahhh, j'ai saisi !

Héhé

C'est donc à ça qu'elle veut jouer ?

Je prends un des trombones qui composait mon H, la fixe, tends le bras et le laisse délibérément tomber. De là où je suis, il n'y a aucun doute quant au fait que ma collègue ne lit pas un mot sur la feuille mais m’observe.

Heureusement loverboy ne peut pas s'en rendre compte étant donné qu’il est debout et qu’elle a la tête baissée avec ses cheveux qui font barrage.  

Je fais un petit bruit d'agacement et me lève. Ma jupe est fendue à l'arrière et j'ai une idée très précise de l'étendue de peau qu'elle va dévoiler si je fais le mouvement que j’ai à l’esprit. Je me penche pour ramasser le trombone qui m’a "malencontreusement" échappé et m'abaisse en gardant bien les jambes bien droites. Le tissu de ma jupe se tend au niveau de mes fesses et je souris malgré moi... Inutile de regarder, je sais exactement où sont posés ses yeux et me sens complètement offerte. Ma main touche le trombone mais j'attends quelques secondes pour le saisir, le temps de lancer un coup d’œil en arrière.

Le regard noir de ma collègue n'est définitivement pas posé sur le papier qu'elle lit. Elle se racle la gorge, et fait mine de s'accouder en se tenant la tête, pour mieux se cacher j'imagine.

Ahhh le ramassage d'objets divers en tenue de secrétaire, certes un classique, mais un indémodable.

Fière de moi, je me redresse et retourne m'asseoir comme si de rien n'était, prenant bien soin de remonter un peu ma jupe. Le bureau me dissimulera aux yeux de Benjamin, mais c'est tout.

Je saisis mon téléphone et tape ;

Merci, je ne l'avais pas vu. Il fait chaud ou c'est moi ?

Et non, ce n'est pas une figure de style. Les hormones sûrement, mais je meurs.

Erin rend son papier au jeune homme et lui dit :

-          Il faudra voir avec le secrétariat pour ce dont tu parles dans le deuxième paragraphe. Pour les autres points, tout est là

Oh, elle a réussi à lire quand même, je suis impressionnée. Pendant qu'il relit sa feuille et celle qu'elle lui a tendue, elle répond :

C'est toi qui me donnes chaud. J'essaie de faire vite.

Je souris. Enfin une bonne nouvelle.

Je ne sais pas trop d'où sort ce nouveau côté "aventureux" que j'ai développé, je n'ai certainement jamais été comme ça avant, mais ce n'est pas pour me déplaire. Au moins pendant ce temps je m'amuse et je ne me prends pas la tête, et je peux me tromper, mais je crois que je ne suis pas la seule.

Je n'arrive pas à dissimuler mon sourire en entendant Erin dire :

-          Bon... Je crois que c’est tout, n'hésite pas à faire circuler l’info aux autres.

C'est tout juste si elle n'ajoute pas "merci d'être passé", histoire de bien le congédier dans les règles de l'art.

-          Merci pour tout. Et euh... Passez une bonne journée.

-          Oh ne t’inquiète pas pour moi !

A son silence, j’imagine que sa réponse le laisse perplexe et m'efforce de retenir mon sourire et d'avoir l'air concentrée sur ce que je prétends lire depuis tout à l'heure. J’en suis à la deuxième phrase. Le pauvre, il ne se doute de rien.

-          Au revoir Mme Klein.

Bien qu'étonnée qu'il se souvienne de mon nom, je lève la tête et lance :

-          Au revoir.

À peine a-t-il fermé la porte que j'entends Erin se mettre debout. Je continue de faire semblant de lire tandis qu'elle nous enferme puis vient se placer dans mon dos.

Son souffle pourtant chaud me fait frissonner lorsqu'elle écarte mes cheveux pour murmurer à mon oreille.

-          Tu réalises que c'est cruel de me dire des choses comme ça alors que je ne peux rien faire ?

Je ne réponds pas immédiatement, plus parce qu'elle m'embrasse partout dans le cou et c'est distrayant que par manque de répartie.

Amies ? Ça craint comme idée !

Ses mains me caressent les bras et je fais tourner ma chaise, mettant fin à sa douce torture avant de répliquer :

-          Tu crois que je mérite une leçon ?

Ses yeux noirs se plissent et elle passe sa langue sur ses lèvres avant d’acquiescer.

-          Hmm hmm, je crois en effet.

Et ses lèvres capturent les miennes.

Je retiens tant bien que mal le petit  gémissement que j'ai envie de pousser, ne sachant pas qui est dans le couloir à cette heure. Et ayant peur d’être surprise dans une position pour le moins compromettante.

À mon grand regret, elle met fin au baiser, mais s'installe à cheval sur moi, enroulant ses bras autour de ma nuque.

-          C'est peut-être con, mais ça m'avait manqué.

-          Alors on doit être deux connes...

Je pose mes mains sur ses fesses pour l'aider à tenir (bon et peut être un peu pour une autre raison moins avouable) et l'embrasse. Je ne pense pas pouvoir un jour m'en passer maintenant que j'y ai goûté. Elle se recule et me demande, tout sourire :

-          Je croyais qu’on devait s’en tenir à de l’amitié ?

-          Tu t’es regardée ? Je suis qu’humaine !

Ce concept de « juste potes » ne va pas le faire si je dois la côtoyer alors qu’elle est si… Pfiou !

Juste quand je m'emporte, on toque à la porte. Je fixe ma collègue l'air de dire "sérieusement ?" alors qu'elle se recule.

J'essaie de la retenir et chuchote, geignarde :

-          On n’est pas là !

Elle rit, me dépose un dernier petit bisou sur les lèvres et répond :

-          Ils ont rendez-vous. Je t'avais bien dit que tu allais être punie !

-          Très drôle.

Je l'observe aller ouvrir la porte, tentant de la déverrouiller silencieusement. Et si vous vous posez la question, OUI je suis blasée et OUI je boude !

 

* * * *

 

Je sens quelque chose se poser sur mon épaule et lorsque je tourne la tête pour regarder ce que c’est, un cri qui ne va pas exactement me faire passer pour une guerrière m’échappe.

Un demi-tour en toute hâte plus tard, je trouve mon cousin, une araignée en plastique à la main, se tordant de rire.

-          Très drôle.

-          Ohhh que oui ! T’aurais dû entendre ton cri !

-          Tu fais erreur, je ne crie pas !

-          Ça, c’est entre toi et… Erin si je ne m’abuse !

Il faut que quelqu’un m’explique pourquoi, au grand loto de l’univers, j’ai tiré le seul cousin diabolique !

Je lui arrache le jouet des mains, juste pour le plaisir de lui lancer au visage.

Si j’avais su, je ne lui aurais jamais parlé de cette histoire !

-          T’es cruel, tu en as conscience ?

-          Peut-être bien, mais c’est toi qui m’a appelé pour qu’on se voie !

-          Ouais bah je suis une idiote !

Il me regarde, souriant et demande :

-          Tu accepterais de répéter ça une fois que j’enregistrerai ?

-          Va chier ! Tu ne pourrais pas oublier ce que je t’ai avoué ce qu’il se passe ?

-          Tu plaisantes ou quoi ? Y’a pas eu de nouvelle aussi croustillante depuis le baiser entre Madonna et Britney ! Et quitte à ce que ma cousine soit une grosse lesbienne, Erin n’est pas un mauvais choix, elle est canon !

Je lui frappe la cuisse tandis qu’il se met à marcher à mes côtés.

-          T’es pas supposé la reluquer !!!

Mika se tourne et m’observe d’un air qui signifie plutôt clairement « t’es sérieuse là ? » :

-          Tu la connais, ce qui la rend abordable, elle est sublime et je suis un mec hétérosexuel célibataire, c’est si je le faisais pas que ça serait inquiétant !

Je soupire et secoue la tête en riant. Il est grave, mais on va dire que ça fait partie de son charme.

Grommelant, j’ajoute :

-          Et arrête de dire que je suis lesbienne !

On passe les haies qui délimitent l’entrée du parc et continuons à avancer, à la recherche d’un banc pour nous asseoir. Il hausse les sourcils et demande :

-          Parce que tu l’es pas ?

Comment je suis supposée savoir moi ? Si je connaissais la réponse, je serais au choix de retour dans les bras de Julien ou au lit avec Erin !

-          Euh… On a qu’à dire que je suis… Hétéro flexible.

-          Et on parle de quel degré de flexibilité là ?

Au vu de son air pervers, je sais qu’il pense à quelque chose que je ne préfère même pas imaginer. Sinon je risque de voir M. Haru plus longtemps que prévu.

Je lève et yeux au ciel et repère un banc, sur lequel je vais m’affaler en soupirant. Mika s’assied à côté de moi et pose une main sur mon épaule :

-          Pourquoi tu luttes autant ? Elle te plait non ?

-          C’est pas si simple !

-          Au contraire, je trouve ça très simple moi, mais explique toi.

Je relève la tête et observe les gens qui flânent autour de nous, cherchant mes mots.

-          Avant, c’était pas compliqué. J’étais avec Julien, la vie était « facile ».

Je mime des guillemets du bout des doigts et continue :

-          Et voilà qu’Erin arrive et tout est remis en question. J’ai l’impression de plus rien contrôler et je déteste ça. Un moment je me dis que c’était juste un coup de folie, que ça n’arrivera plus et la minute après je me surprends à faire des trucs dont je ne me croyais pas capable ! Et je m’énerve moi-même à ne pas savoir ce que je veux et à souffler le chaud et le froid avec elle !

Une fois ma petite tirade terminée, je respire rapidement, soulagée que ça soit sorti. Mika attend quelques secondes avant de me donner son avis :

-          Honnêtement ? La manière dont tu viens de présenter les choses implique que quoi que tu décides, tu finis toujours par aller vers elle. Et puisque je suis certain que tu m’as contacté pour obtenir les fruits de mon infinie sagesse sous la forme d’un conseil, le voilà : je serais toi, j’arrêterais de me prendre la tête et je foncerais !

Il a pas tort.

Argh, je DETESTE quand il a raison.

 

* * * * *

J’essaie de me voir tant bien que mal dans le reflet de la vitre du couloir, mais évidemment je n’y arrive pas. J’ai eu beau mettre environ 3H à choisir mes habits, je doute encore et toujours.

Finalement, je prends une inspiration et toque à la porte, étant déjà assez en retard comme ça. Travaux à la con !

J’entends des pas et après quelques secondes, Erin m’ouvre.

-          Salut ! Ne reste pas là, entre.

Elle se recule et je suis tellement soufflée par son look que j’en oublie de répondre. Elle a attaché ses cheveux, mettant son visage en valeur. Elle porte un petit haut sans bretelles, un genre de bustier à motif écossais avec un minuscule lacet à l’avant pour l’esthétique. Je passe à côté d’elle comme un zombie, échouant lamentablement à l’épreuve « ne pas regarder dans son décolleté ».

J’espère retrouver le contrôle de mes globes oculaires tandis qu’elle ferme la porte, mais c’est sans compter sur la façon dont son pantalon noir moule ses formes.

Arghhhh !

Finalement, elle se retourne et me fait face. Je réalise que je ne sais pas trop comment lui dire bonjour étant donné qu’on a jamais été vraiment seules depuis notre « dérapage ».

Elle s’approche de moi et me fait un petit sourire timide. Ses yeux pétillent et sont juste superbes, à tel point que j’oublie mes réserves et m’avance pour venir l’embrasser.

Étonnamment, notre baiser est doux et lent. Je découvre ses lèvres comme si c’était la première fois, prenant mon temps.

Elle se recule, mes mains dans les siennes et lance un :

-          Bonjour !

-          Bonjour !

Je suis fière de moi, j’ai pensé à répondre. Mon cœur fait encore une fois la course dans ma cage thoracique et je fais à Erin un sourire tellement grand qu’il me fait mal aux muscles faciaux.

Je me mords la lèvre et résiste vaillamment à l’envie de faire courir mes doigts sur le haut de sa poitrine, comprimée par le bustier.

À la place je me recule et me racle la gorge, bien consciente de son pouce qui caresse doucement le dos de ma main, et lui demande :

-          Ça va ?

-          Oui et toi ?

-          Ça va merci.

Je la regarde dans les yeux m’y noyant complètement et n’ayant pas la moindre intention d’appeler à l’aide. Son sourire me sort de ma torpeur :

-          T’es craquante, mais faut qu’on se bouge sinon on sera en retard.

Pfff. J’ai pas envie de m’y rendre de toute manière. Un sourire me vient aux lèvres en repensant à la tête du directeur quand je lui ai demandé à quel point cette réunion obligatoire l’était vraiment.

Apparemment, on n’a pas tous les mêmes priorités. La mienne est de réussir à parler à Erin plus de 5 minutes. Le reste m’est bien égal. Dire qu’à la base j’étais supposée arriver en avance pour qu’on fasse exactement ça, mais qu’à cause de ces travaux de m**** on ne peut pas… Ça me tue.

On descend les marches, et je la laisse marcher devant pour pouvoir voir son décolleté par-dessus son épaule. Ces derniers temps, je développe des talents de ninja pervers, ma progression est impressionnante !

Une pression sur le bouton contrôlant l’ouverture centralisée des portes et nous entrons toutes les deux dans ma voiture.

Après quelques minutes passées à lutter pour ne pas poser ma main sur son genou, on arrive à la fac. J’ai envie de parler de « nous », mais sans avoir à être pressée par le temps.

Un brouhaha ambiant règne dans l’amphi alors que nous rentrons. Je m’installe à l’arrière, comme au bon vieux temps où j’étais élève. Erin se glisse dans mon dos et s’apprête à se placer à côté de moi, quand le directeur lui fait signe de s’approcher. Elle me fait un petit sourire et va le voir, laissant sa main caresser mon épaule au passage.

Mes yeux glissent sur elle tandis qu’elle descend les marches avec une grâce féline. Je ne peux m’empêcher de remarquer la façon dont les têtes tournent sur son passage. Erin n’a pas l’air d’en avoir conscience, mais les trois quarts des personnes présentent l’observent. Je vois la main du directeur se poser sur son avant-bras et rit amèrement. Évidemment, lui aussi. Même s’il est marié et assez âgé pour être son père, il est complètement sous son  charme… Fais la queue bonhomme, t’es pas le seul dans cette file !

Je me sens soudainement insignifiante. Elle pourrait avoir n’importe qui dans cette pièce. Qu’est-ce qu’elle fout avec moi ? Enfin, non pas qu’on soit ensemble, mais… Je me comprends !

Sa tenue, qui me plaisait tant tout à l’heure, m’a à présent l’air trop… Juste trop. Je les vois la caresser du regard et ça me tue. Je m’efforce de rester immobile et de sourire, mais en réalité je doute. Et si jamais je lui faisais honte ? Je ne veux pas que tout le monde soit au courant de ma vie privée, mais je n’ai pas non plus envie d’être un vilain petit secret…

Finalement, une fois que j’ai eu le temps de ruminer, je réalise que je peux me permettre des libertés avec elle, qu’aucun d’entre eux n’oserait même rêver. Et ça, ça me fait sourire.

La réunion se passe rapidement, et je suis prête à m’enfuir lorsque j’apprends qu’il y a un pot d’organisé. À contrecœur je m’y rends. On se tasse tous dans une salle exigüe. Sérieusement, on n’aurait pas pu rester dans l’amphi ? Au moins j’avais un peu d’espace pour respirer !

Je me tourne vers Erin pour lui savoir ce qu’elle a envie de boire, mais elle me bat en demandant :

-          Tu veux quoi ma belle ?

Je suis à la fois heureuse et gênée par le petit surnom qu’elle vient de me donner devant nos collègues et réponds timidement :

-          La même chose que toi.

Elle sourit et secoue la tête en riant :

-          Comment tu peux dire ça, je ne sais même pas encore ce que je veux !

Je fais une moue malicieuse et réplique :

-          Ça me paraît être un bon choix !  Allez file !

Je la gratifie d’une tape aux fesses, qui aurait l’air amicale pour n’importe qui qui verrait la scène, mais vu la façon dont ma collègue me regarde par-dessus son épaule tout en partant, elle sait très bien que c’est juste une excuse pour la peloter. J’admire la façon dont son jeans lui moule ses parfaites petites f-

-          Vous avez l’air proches.

Hein ?

On te parle, concentre-toi perverse !

-          Pardon ?

-          Erin et toi, vous avez l’air proches.

Je retiens vaillamment à la fois le sourire lubrique et le frottement de mains que j’ai envie de faire et me contente d’un :

-          On l’est. Pourquoi ça ?

Le collègue hausse les épaules et répond d’un air faussement désintéressé :

-          Comme ça. Tu sais si elle a quelqu’un dans sa vie ?

Oui, et oui, maintenant dégage.

J’observe la « concurrence », tandis qu’il se tient devant moi avec sa petite chemisette blanche et son jeans années 40 remonté jusque sous les aisselles. Manque plus que les bretelles et le rire et on a un Steve Urkel.

Un autre collègue lui file un grand coup de coude et le regarde avec des gros yeux.

Je fronce les sourcils un instant, ne pigeant pas pourquoi il a fait ça. En voyant Steve Urkel rougir et baisser les yeux, j’ai soudain une idée bien précise.

Il se met à parler et confirme ma théorie pile au moment où ma collègue revient :

-          Enfin, je… j’ai entendu les rumeurs sur vous deux et je... enfin… j’espère que ce n’est vrai ?

Erin me fixe en haussant un sourcil d’un air amusé, me tendant une boisson encore non identifiée. Le type et son pote attendent bien sagement, n’osant pas croiser notre regard. Je me sens rougir et je la déteste, parce qu’elle l’a fait exprès. Finalement, elle me sauve de l’auto combustion en disant :

-          Tsss…. On peut pas te laisser seule cinq minutes hein ?

Je lui fais un petit sourire désolé, contente qu’elle ne le prenne pas mal.

Elle se penche vers les deux curieux, regarde de gauche à droite et leur lance sur un ton indéchiffrable :

-          J’essaie de lui faire comprendre qu’on est faites l’une pour l’autre, pour l’instant elle me repousse encore, mais c’est qu’une question de temps.

Ceci étant dit, elle les laisse plantés là, me tirant un peu plus loin. Je la sens glisser sa main dans la poche arrière de mon jeans. Je souris en secouant la tête et la lui frappe. Elle murmure un « oups » absolument pas convaincant et la place en bas de mon dos.

Je jette un coup d’œil derrière nous et les deux collègues sont toujours là, ne sachant pas si c’est du lard ou du cochon.

Je me tourne vers Erin :

-          Ça t’amuse ?

-          De quoi ?

L’air innocent qu’elle essaie de se donner contraste totalement avec le sourire coquin qu’elle arbore. Je n’arrive pas à m’empêcher de sourire en retour. Ses yeux brillent, elle est tout simplement superbe. Je me mords la lèvre pour tenter de me retenir de l’embrasser, et elle n’en manque pas une miette. Elle sait. Je détourne l’attention en déclarant :

-          Tu réalises que tu viens de confirmer la rumeur ?

-          Juste en ce qui me concerne. Et ce n’était pas un mensonge !

Je secoue la tête en riant et me colle à elle pour lui murmurer à l’oreille d’un ton joueur :

-          Ne me tente pas, je pourrais m’assurer que tout le monde voie que c’est réciproque !

-          Chiche ?

Je la regarde fixement, étant à une distance tout sauf raisonnable pour une amie. Si je m’écoute, je me jette sur elle. Mais c’est pas vraiment l’endroit. Et bien qu’on soit deux adultes consentantes, je ne sais pas comment ça pourrait agir sur nos carrières respectives. La fac est un milieu éclectique et tolérant, mais la société ne l’est pas. Et je n’ai pas envie d’être catégorisée comme « la lesbienne ». Même si n’importe quelle femme qui pose les yeux sur Erin le devient un peu.

Si si.

C’est une règle universelle j’vous dis !

Je suis sauvée par Nico qui arrive et nous passe toutes les deux un bras sur les épaules.

-          Du calme les filles, les gens bavent !

Je lui lance un regard noir, en partie pour sortir des conneries pareilles, mais surtout pour avoir brisé l’instant.

-          Très drôle.

-          Je suis sérieux !

 

Publicité
Publicité
Commentaires
L
oooooh j adore *.* <br /> <br /> Tu écris magnifiquement bien ! <br /> <br /> Et j'attends la suite avec impatience :D
Répondre
Publicité