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Fictions Lesbiennes :)
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22 février 2016

Chapitre 9 : Tourner la page

Une semaine et demie.

Onze longues journées sans voir mes amis ensemble.

Depuis le désastre, j'évite Anna autant que mon client du moment évite d'être sympathique. En soi, c'est un job à temps plein. Étant donné que Baptiste l'invite systématiquement aux soirées, je l'ai très peu vu lui aussi. Du coup, le sevrage est brutal. D'ordinaire on se donne rendez-vous quasi tous les jours, ça fait étrange.

Mais bon, il faut ce qu'il faut.

J'en ai besoin.

Je dois prendre le temps de me reconstruire émotionnellement et c'est pas en voyant ma kiné tous les jours que ça va se faire. Et j'ai tout à fait conscience du fait que malgré mes absences répétées elle n'a même pas pris la peine d'envoyer le moindre message pour avoir de mes nouvelles. Selon moi, ça en dit long.

Comme dirait ma mère : donne à manger à un âne il te fera des crottes.

C'est fini, je ne nourrirais plus cet âne. Enfin ânesse. Anna. Bref, vous voyez le truc.

C'est pourquoi ce soir j'ai un rencard avec Karen.

C'est aussi pourquoi je suis complètement en train de flipper ! La panique doit certainement affecter mes connexions neuronales puisque je roule en direction du bar où bosse Lulu dans le secret espoir qu'elle me mette en condition psychologique. Après tout, c'est sûrement elle qui la connaît le mieux. Elle doit avoir des conseils !

Normalement, elle quitte à 17 heures, logiquement je devrais arriver pile au moment où elle débauchera.

Du moins j'espère, car elle ne sait pas que je viens. Elle a passé les derniers jours à s'excuser et j'ai eu peur qu'une arrivée annoncée ne l'encourage à me tendre un guet-apens pour arranger les choses avec Anna. Donc je me suis bien gardée de la prévenir. Comme qui dirait, l'enfer est pavé de bonnes intentions.

 

Un coup d'oeil à l'intérieur me confirme qu'elle est toujours là et je m'adosse à la devanture pour faire le pied de grue le temps qu'elle termine son service.

A peine quelques minutes plus tard elle me rejoint :

- Ah tiens, la femme invisible ! Hellooooooo ! Comment ça va ? Ça fait plaisir !

Si c'était venu de quelqu'un d'autre, j'aurais probablement remballé la personne en l'entendant dire ça, mais c'est ma Lulu et c'est juste sa façon de s'exprimer, alors je laisse couler :

- Ça va merci ! La même ! Toi la forme ?

Je m'apprête à me mettre en route vers chez elle lorsqu'elle m'arrête d'une main sur le bras :

- Nickel, tu me connais, rien ne m'abat ! Attends, ya Tam' qui vient aussi me chercher normalement.

Mon visage doit très clairement indiquer ce que je pense en grosses lettres fluorescentes puisqu'elle s'empresse d'ajouter :

- T'en fais pas, Anna l'a laissée partir plus tôt, elle ne se joindra pas à nous.

Cette annonce me fait pousser un soupir de soulagement. A quelques heures de mon premier rencard avec potentiel depuis un bon moment, j'ai besoin d'encouragements, pas d'être abattue !

Comme prévu, Tamiko arrive comme une fleur.

- Tiens, bonjour vous ! Salut Lu'!

Lucie, beaucoup plus à l'aise que moi, lui fait la bise dans un "Coucou ma belle !" tandis que je croasse un "Salut !".

Je ponctue le tout d'un signe de la main pas franchement naturel. Je regrette d'être venue.

Est-ce que si je me barre en courant, sans un mot, ça aura l'air louche ? Parce que c'est tentant !  Ne trouvant pas d'excuse valable pour m'enfuir sans en avoir l'air, je les suis jusqu'à la voiture, grimpe à l'arrière et m'efforce fusionner avec la banquette. Visiblement, il faut encore que je bosse mon look, puisque Lucie demande :

- Au fait, non pas que je ne n'apprécie pas ta venue, mais quel bon vent t'amène ?

Je croise son regard dans le rétroviseur et me retrouve face à un dilemme. D'un côté j'ai envie de crier sur tous les toits que j'ai un rencard (et que, par conséquent je n'ai pas besoin d'Anna), de l'autre... Je me sens coupable de le dire. Alors que je n'ai pas de raison.

Elle a été très claire. Limpide même. Je veux dire, j'étais prête à donner tout ce que j'avais, à ME donner et elle m'a laissée tomber comme une socquette trouée dont on aurait en plus perdu la jumelle.

C'est décidé.

Je refuse de rester une vieille chaussette !

A présent, je serai un... Un pull. Non, pas ça. Un truc plus sexy.

Je serai un... sous-vêtement porte-bonheur !

- Je venais te demander conseil pour mon rencard avec Karen ce soir.

Voilà. C'est dit.

Immédiatement, le regard de Lucie croise le mien dans le rétro et je vois à ses yeux qu'elle sourit :

- Bien ça !!

- Ouais... Oui !

Dans le genre "je n'ai pas l'air convaincue" on ne fait pas mieux !

Si j'arrivais à me départir de l'idée que c'est ma dernière chance de ne pas finir mes jours toute seule, peut être que je serais un brin plus détendue !

Cherchant du soutien, Lucie file une tape sur la cuisse de Tami et demande :

- J'ai pas raison ? C'est une super nouvelle ! Fais-lui entendre raison elle a pas l'air sûre d'elle.

- Si si, c'est cool.

Quelque part, je suis soulagée de constater qu'il y a pire menteuse que moi.

Fort heureusement, on arrive dans la ZAC avant que l'une ou l'autre puisse continuer la conversation. N'écoutant que mon courage, je n'hésite pas une seule seconde et change le sujet en demandant "vous voulez vous acheter quoi au juste ?" :

Lucie me répond sans entrain :

- Rien de particulier. Des fringues...

Mais se reprend bien vite :

- Mais maintenant que je sais que le jour J est arrivé, j'ai bien l'intention de faire de toi la plus belle pour aller danser.

Sans se concerter, Tami et elle se regardent et ajoutent en chantonnant : danseeeeeer !

-_-

Bref.

- Alors déjà, on ne va pas danser, enfin pas que je sache... Et puis je suis déjà habillée. Je veux des conseils d'ordre psychologique, c'est tout !

Lucie lève un sourcil et pointe mon corps dans un aller-retour du doigt. S'en suit un piétinement allègre de mon peu de confiance en moi :

- Euh chérie, si c'est ça que tu appelles prête, dans l'heure à venir ta vision du monde va changer ! CHANGER !

Je baisse les yeux vers ma tenue.

Ok c'est pas franchement glamour, mais c'est confortable. Je préfère me sentir à l'aise ! Il n'y a pas de mal à ça !

- N'exagère pas, c'est pas si mal. Si ?

Levant la tête, je jette un regard plein d'attentes en direction de Tamiko, l'élevant au rang de juge de paix. Elle se balance d'un pied à l'autre et n'a pas l'air de savoir quoi dire, ni comment le formuler... Ouais... Ok. Message reçu.

Blasée, je m'adresse à mon amie et m'avoue vaincue :

- T'as gagné, je te suis. Mais que ce soit clair, j'ai un droit de véto et je n'hésiterai pas à en faire usage !

À peine ai-je vocalisé mon accord qu'elle s'enfuit en direction d'une boutique dans un "oui oui" (cause toujours), tellement vite que je me demande s'il n'y a pas le feu quelque part.

En bonne fashionista, elle virevolte de pile en pile et après deux minutes dans le magasin, revient vers moi les bras chargés de vêtements. Sans même me demander mon avis, elle me fourre le tout dans les bras et me pousse jusqu'à la cabine d'essayage. Bien évidemment, Tamiko ne lève pas l'ombre du petit doigt pour m'aider !

J'ai cependant un regain d'espoir et m'imagine déjà échapper à l'essayage en constatant que le nombre de vêtements qu'il est possible d'emmener en cabine est limité. Malheureusement, mes attentes sont bien vite annihilées lorsque Lucie, en véritable habituée des lieux, va saluer la dame responsable des essayages.

Le rideau se referme derrière moi. Je détaille pour la première fois les habits choisis. Pas mal.

Minute! :

- Lu', comment tu connais ma taille ?

- L'oeil de l'experte chérie, essaie le haut rouge, il va faire ressortir tes yeux ! Je vais regarder si je trouve autre chose, je reviens, t'as intérêt à me montrer !

Résignée, je retire mon haut alors que je l'entends s'éloigner. Pendant quelques secondes, j'observe mon reflet dans le miroir, tentant de voir au delà de mes défauts. C'est pas gagné cette histoire.

Je m'empare du seul haut rouge de la pile et m'apprête à l'enfiler lorsque Tami déboule dans ma cabine.

- AHHH ! Mais ça va pas ? Qu'est-ce qui te prend ? Sors de là !

Je tente de me couvrir du mieux que je peux tout essayant de la mettre dehors. Malheureusement, c'est loin d'être un succès, d'un côté comme de l'autre. D'un doigt sur ses lèvres, elle me fait le signe "chut" et m'attrape par les épaules pour m'empêcher de m'agiter.

- Désolée, je voulais juste te parler seule à seule. C'est le moment qui m'a paru opportun !

- Opportun ? OPPORTUN ?! Tu piétines mon intimité à coup de talons aiguilles !

- Je t'ai déjà vue en maillot de bain.

- Alors déjà non, j'étais dans l'eau tout du long, et c'est pas pareil !

Elle hausse un sourcil et attend que je termine de râler.

Finalement, de mauvaise grâce et constatant qu'elle ne déhotte pas, je lui fais signe de continuer de la main. Elle ne perd pas un instant avant de s'exécuter :

- C'est quoi cette histoire de rencard ? C'est vrai ?

Offusquée qu'elle ait ressenti le besoin de demander, je m'exclame :

- Bien sûr que c'est vrai !

- Mais...

Elle cherche ses mots et finit par dire, presque timidement :

- Et Anna ?

J'ai tout à fait conscience du fait que la déception se lit sur mon visage, mais inutile de me fatiguer à essayer de la camoufler, c'est peine perdue :

- Anna a visiblement ses problèmes... Elle s'est montrée très claire. Ça fait déjà trop longtemps que je m'acharne.

Tami baisse les yeux et semble chercher ses mots, mais apparemment elle sait qu’aucune excuse ne fera l’affaire puisqu’elle se contente de répondre :

- Je vois… Tu veux bien que je lui en parle ?

Un petit rire désabusé m’échappe en entendant ça :

- Te fatigue pas. J’ai saisi son message. La preuve, je passe à autre chose.

Elle acquiesce et sort (ENFIN !) de la cabine sans un mot de plus.

Je glisse ma tête à travers le haut, pas sûre d’être satisfaite de cette conclusion. En voyant mon reflet, je connais la réponse.

 Je force un sourire sur mes lèvres et tâche d’avoir l’air heureuse. Faut pas que je m’arrête à ça, à elle… Je ne peux pas attendre éternellement. Résolue, j’enfile également un jeans bleu nuit, quasi noir.

Quoi qu’on en dise, Lucie a l’œil. J’ai du mal à reconnaître la fille dans le miroir, mais une chose est sûre… Elle est sexy ! Je suis à peine sortie de la cabine qu’elle s’empare de moi et me fait bouger façon marionnette.

- J’approuve. Je le savais, t’es un gâchis au quotidien !

- Bah merci !

Ignorant totalement l’affront qu’elle vient de faire, Lucie continue sur sa lancée :

- T’as des sous vêts coordonnés ? Nan parce qu’en rajoutant la paire de chaussures qui va bien, ce soir elle tente sa chance, je te l’annonce!

- N’importe quoi.

Voyant qu'elle s'apprête à ouvrir la bouche, je la recadre tout de suite :

- Il est hors de question que tu choisisses mes sous-vêtements, qu'on se le dise !

Elle croise les bras sur sa poitrine et entreprend de bouder. Si elle croit me faire pitié, elle va bouder longtemps. Je ne peux m'empêcher de remarquer que Tami ne fait pas preuve d'un enthousiasme débordant devant l'objet de notre discussion. Elle est affairée sur son téléphone portable et si je ne craignais une planchette japonaise en guise de représailles, nul doute que je tenterais de piquer ce dernier pour voir ce qu'elle trafique. Une partie de moi a peur qu'elle ne soit en train de me dénoncer à Anna.

Oh et puis qu'elle le fasse.

 

*          *          *          *          *          *

 

Elle me dépose au coin de l'immeuble et part à la recherche d'une place de parking. Trottinant jusqu'à la porte, je recense les nids à bazar dans ma tête. J'espère que je vais réussir à rendre l'appart présentable en si peu de temps. Alors que je tourne à l'angle du bâtiment, je remarque quelqu'un assis sur les marches de l'entrée qui sont plongées dans la pénombre. Je m'approche d'un air méfiant, juste au cas où ! Je regarde enquêtes criminelles et faites entrer l'accusé vous savez !

Ce n'est qu'une fois à quelques mètres que je reconnais ma kiné, vêtue de sa combinaison de motarde.

- Anna ? Qu'est-ce que tu fais là ?

Traduction : ça ne m'arrange pas !

C'est pas bon, pas bon du tout même! Comment je suis supposée réussir à passer à autre chose si elle se pointe comme une fleur le jour de mon premier rencard ? Et qu'est-ce que je dirais à Karen si elle l'aperçoit ?

En me voyant, elle se lève précipitamment. Clairement nerveuse, elle glisse ses mains dans ses poches et lance un timide :

- Salut.

Je lui fais la bise, tout en cherchant comment l'expédier le plus rapidement possible et sans la vexer. Et tant qu'elle y sera, si elle pouvait partir avec mon sentiment de culpabilité d'avoir eu ce rendez-vous avec quelqu'un d'autre qu'elle, ce serait bien !

Ne voulant pas reposer ma question, j'attends qu'elle parle. Elle se balance d'une jambe à l'autre, sans un mot, ouvrant et fermant la bouche.

Je l'observe en silence tandis qu'elle se débat avec son esprit.

Bon...

Ça fait bien quarante secondes qu'elle bafouille sans former une phrase et honnêtement, ça m'agace. Beaucoup.

Elle vient ici, interrompt ma soirée et n'est même pas capable de me dire pourquoi ?

Stop maintenant. J'en ai marre de ses jeux, je veux passer à autre chose.

Et cette situation me stresse.

Karen va arriver d'une seconde à l'autre et je n'ai pas mérité de finir mon rencard sur un moment bizarre, juste parce qu'Anna s'est enfin décidée à me parler.

Je soupire et jette l'éponge :

- Tu sais quoi ? Laisse tomber.

Je me détourne d'elle et cherche mes clefs à l'intérieur de mon sac, bien décidée à la laisser sur le trottoir. 

- Inès...

Un petit rire amer m'échappe en voyant qu'elle ne trouve toujours pas les mots, mais je m'abstiens de tout commentaire, glissant la clef dans la serrure et poussant la porte. Elle saisit ma main et je me retiens de l'envoyer sérieusement balader, partiellement parce que j'ai malgré tout envie de savoir ce qu'elle veut.

Je la laisse me tourner, m'adossant à la porte pour éviter qu'elle ne se referme et croise mes bras sur ma poitrine.

C'est maintenant ou jamais Anna.

Crache le morceau.

Sur le côté de l'immeuble, les graviers crissent au loin, annonçant l'arrivée de quelqu'un. Je tourne la tête dans cette direction avec une boule au ventre, sachant très bien qui approche.

Une expression d'urgence sur le visage, je fais face à Anna, prête à lui demander de partir.

Elle me prend totalement par surprise en saisissant mon visage entre ses mains et se collant à moi.

Ses lèvres capturent les miennes dans un baiser brûlant, plein d'urgence.

Bien que mon cœur explose littéralement dans ma poitrine, je m'efforce de ne pas vraiment répondre, sans pour autant réussir à rester de marbre. 

Loin de se décourager, elle glisse un bras dans mon dos et me serre contre elle. Des effluves de cuir et de parfum me parviennent aux narines et créent un déclic en moi.

J'ai celle que je veux au bout des lèvres et elle est tout ce que j'attendais, et plus encore... Je m'apprête à répondre avec enthousiasme quand le son de quelque chose qui tombe sur les graviers, suivi d'un juron, me rappelle la situation.

Même si ça me tue, je me recule et manque de m'étaler lorsque la porte s'ouvre sous mon poids. Toujours sous le choc et au comble du glamour, je fixe Anna, les yeux et la bouche grands ouverts.

Karen finit par se montrer et je prie pour ne pas avoir l'air aussi coupable que je me sens. Pour donner un ordre d'idée, je me sens à peu près aussi bien que si ma première conversation avec la fille de mes rêves se déroulait dans les toilettes turques d'un camping alors que j'ai ingéré une quantité industrielle de flageolets.

Mais revenons-en à ma misère amoureuse. Le regard de Karen se pose sur Anna, puis sur moi, l'air d'attendre une explication à sa présence. Sous l'effet du stress ou de ce qui sera consigné comme un monument de stupidité, je dis la première chose qui me vient à l'esprit et qui - heureuse coïncidence - se trouve être la pire à laquelle j'aurais pu songer :

- Et bien merci Anna, c'est gentil d'être passée ! Fallait pas te donner cette peine juste pour me rendre le double des clefs de Baptiste !

J'ai à peine fini de prononcer les mots, je regrette déjà. Ma culpabilité atteint son point culminant en voyant l'expression d'Anna se décomposer au moment où la signification de mes paroles ne laisse plus de doute. À tel point que la présence de Karen est la seule chose qui me retienne de me mettre à genoux pour demander pardon.

Mais à la place je ne fais rien, me contentant d'attendre qu'elle parte après avoir été congédiée comme une malpropre.

Après ce qui me paraît être une éternité, elle pousse un soupir de dédain et nous quitte, avec sur le visage l'expression d'une sévère trahison.

Judas aurait été fier de moi.

N'ayant pas manqué une miette de la scène et étant loin d'être conne, je me doute que Karen sait qu'elle a raté quelque chose. La question est dans ses yeux mais fort heureusement elle ne me demande rien. Ça m'arrange.

Forçant un sourire sur mes lèvres, je lui ouvre la porte en grande pompe, tentant de détourner l'attention avec mes singeries.

Malgré moi, mon regard se pose sur la silhouette d'Anna qui s'éloigne dans la nuit, les épaules voutées, comme défaite. Mon coeur se serre en l'observant partir.

Je me détourne de cette vision et emboite le pas à Karen, une grosse boule au ventre.

Qu'est-ce que j'ai fait ?!

Espérons que même si ma façon de l'annoncer était franchement pourrie, ma décision était la bonne.

 

*          *          *          *          *          *

 

Je tourne et retourne dans le lit, le sommeil jouant les déserteurs.

C'est bien le moment.

Il parait que la nuit porte conseil mais j'imagine que ça implique de dormir..

Allez quoi !!!

Rien à faire, la soirée et plus précisément mon "altercation" avec Anna me trottent dans la tête.

Je change une nouvelle fois de position et repousse les couvertures.  M'emparant de mon téléphone, j'y regarde l'heure, espérant qu'il me reste suffisamment de temps devant moi pour grappiller quelques heures de sommeil.

5h43... Et un texto.

Mon palpitant s'engage dans une course effrénée, sachant très bien qui m'a envoyé un message avant même de le consulter. Ironiquement, ce n'est que maintenant qu'elle m'en envoie.

J'approche mon doigt de l'icône et hésite un moment avant de toucher l'écran. J'ai peur de ce que je vais lire. 

Bon... Courage, repousser l'instant ne sert à rien si ce n'est à trop réfléchir. Et c'est bien connu que ça ne me réussit pas. Rassurée par ma logique façon sophisme, je tapote l'écran.

Le SMS apparaît à la fois trop vite et trop lentement à mon goût :

Salut, j'espère que je ne te réveille pas ou n'interromps rien. Je voulais m'excuser pour ce soir, je n'aurais pas du faire ça. Ça ne se reproduira plus ne t'en fais pas... Il fallait que je tente pour m'éviter tout regret. Au moins, je sais à quoi m'en tenir.

Non non non non non !

Merde !

D'une main, je m'empare d'un oreiller et le plaque sur mon visage. Ahhhhhh ! Qu'est-ce que j'ai fait !

Comment je peux rattraper le coup maintenant ?

Délaissant le coussin, j'agrippe mon smartphone et le regarde comme la bouée de sauvetage que j'espère qu'il va être.

Quoi répondre ?

Tu n'interromps rien.

Non, il faut qu'elle oublie Karen.

Idéalement qu'elle oublie toute la soirée, mais ce n'est pas gagné alors on va viser petit.

M'adressant à la pièce vide, je lance un "tabula rasa", juste au cas où.

J'aimerais que ça se reproduise...

Non, trop direct et ça sonne comme "tu veux être mon amie ?".

La lumière se fait soudain dans mon esprit et j'opte pour une formule qui est certes connue et vicieuse, mais qui a fait ses preuves :

On peut se voir ? Il faut que je te parle.

Et voilààà !

Normalement là elle ne sait pas mon avis à tête reposée sur la situation et va se tourner les méninges pour essayer de deviner tous les scénarios possibles. Ça veut dire qu'elle va penser à moi et c'est exactement ce que je veux.

genius

 

 

 

 

 

Ma jubilation est de courte durée, sa réponse me calmant net :

Honnêtement, je ne sais pas si c'est une bonne idée...

J'ai peur qu'elle se défile si je lui laisse le choix, alors décide de forcer un peu les choses.

T'es chez toi demain ? Je peux passer ?

Peut-être qu'en étant sur son territoire ça la rassurera.

Tami viendra après le boulot, mais normalement je partirai un peu plus tôt qu'elle. 17h?

Un sourire fait son apparition sur mon visage en lisant cela. Yes !

Je tape rapidement ma réponse pour ne pas lui donner le temps de changer d'avis :

Ça me va, merci beaucoup. :)

 

Une petite danse de joie plus tard, je me sens nettement mieux. Avec un peu de chance, j'arriverai à trouver le sommeil. Plus qu'à réfléchir à ce que je pourrais dire pour la convaincre ! 

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Commentaires
A
Cela fait un moment que je te suis. Merci de nous faire partager tes magnifiques histoires. Elles sont très bien écrites et l'humour qu'il y a dans chacune d'elle en font des histoires remarquables.
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