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Fictions Lesbiennes :)
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22 février 2016

Chapitre 13 : Prélèvement d’organes

Je suis réveillée en sursaut par le rire tonitruant de mon meilleur ami.

La lumière du jour filtre à travers les volets. 

Groggy, je me lève et sors de la chambre à la recherche d'un café, tirant sur le T-shirt pour qu'il me couvre davantage.

Ce n'est qu'en apercevant Anna à table que je me souviens de la soirée d'hier.

Un affreux doute m'envahit. Est-ce que ça s'est réellement produit ? 

Je me suis réveillée dans le trou entre le lit et le clic-clac, ce qui ne m'indique rien du tout ! 

Tous deux me sourient tandis que je m'assieds à table.

- Coucou.

Baptiste, bien trop en forme à mon goût, me demande en me servant à boire  :

- Bien dormi ?

Mes yeux tentent de croiser ceux d'Anna mais elle semble obnubilée par sa tasse de café, ayant du mal à émerger. 

- Nickel et toi ? Ton "amie" est déjà partie ? 

La manière dont le visage de Baptiste s'illumine me confirme que la soirée fut bonne avant même qu'il n'ouvre la bouche :

- Très très peu dormi mais ça en valait la peine. Oui, elle est rentrée chez elle tôt ce matin. 

- Tu comptes la revoir ?

Il hausse les épaules et réplique, peu convaincu :

- Je ne sais pas trop, on verra bien ! 

- Ça ça veut dire non !

- Et depuis quand t'es la spécialiste des relations au juste ? 

Ça me démange de répondre "depuis hier soir" mais je m'abstiens parce que 1) je ne sais pas si Anna est prête à l'annoncer à son cousin, 2) je ne sais pas si JE suis prête et 3) je ne mettrais pas ma tête à couper que ça a vraiment eu lieu.

Du coup j'opte pour une répartie nettement moins incisive : 

- Gna gna gna !

Je porte ma tasse à mes lèvres et observe Anna qui vient à ma rescousse en changeant le sujet :

- Tu sais comment tu vas rentrer ?

Malheureusement oui et cette perspective ne me réjouit guère :

- En tram j'en ai bien peur...

S'adressant à son cousin, ma kiné demande :

- T'as un casque à nous prêter ? Je pourrais la ramener... Après tout si je me souviens bien je lui ai promis une balade en moto.

Elle se tourne vers moi, radieuse :

-  Enfin si tu es toujours partante ?

Laisse-moi réfléchir, l'objet de mes fantasmes, en tenue moulante en cuir et moi collée dans son dos avec (éventuellement) mes mains autour de sa taille ? Un peu que je suis partante !

J'acquiesce d'un signe de tête accompagné d'un grand sourire qui, je l'espère, ne me donne pas l'air d'un pédophile à la sortie des classes.

S'il relève le fait que l'atmosphère est à nouveau bonne entre Anna et moi, Baptiste n'en dit rien. Tant mieux, j'ai peur qu'il ne mette les pieds dans le plat, et je préférerais attendre. On ne danse pas la carmagnole sur un pont aux bases fragiles. (Oui c'est de moi, j'ai toujours eu une âme de poétesse).

Du coin de l’œil, façon strabisme divergeant, j'espionne discrètement Anna. Avec ses cheveux nonchalamment attachés et son trop grand T-Shirt sur lequel est inscrit "I hate Mondays", elle est tout juste trognon. C'est agréable de voir une autre facette d'elle, moins proprette. Je pourrais m'habituer à prendre le petit déjeuner avec elle !

Bon ok, je pourrais certainement m'habituer à lui couper les ongles des pieds si ça signifiait vivre à ses côtés à plein temps, mais vous avez saisi l'idée ! 

On termine de manger en silence, chacun à sa manière : je savoure l'instant, Anna a l'air de rêvasser et Batou se goinfre. 

Je pars me changer en premier et Anna suit le même chemin une fois que je suis sortie, me laissant seule avec mon meilleur ami. J'ai l'impression que toutes les histoires entre sa cousine et moi nous ont involontairement éloignés.

Sans réfléchir, j'annonce :

- Tu me manques, on passe moins de temps ensemble en ce moment. Ça te dit d'aller boire un verre un de ces quatre ? Juste tous les deux j'entends.

Il fait gigoter ses sourcils et demande :

- C'est une proposition de rencard ? Tu as enfin succombé à mes charmes ?

- Batou, la seule chose à laquelle je vais succomber ce sont mes crises de vomissements si tu continues sur ce sujet. 

- Tout de suite... Mais si jamais tu changes d'avis... Où tu veux quand tu veux.

Anna revient pile pour entendre la fin de sa phrase et s'enquiert immédiatement :

- J'ai loupé quelque chose ? 

D'un geste dédaigneux de la main, j'annonce :

- Ton cousin qui interprète de façon particulièrement dérangeante ma demande 

amicale à passer plus de temps ensemble. 

- Hey ! Je suis là je te signale !

Ignorant son air offusqué, ma kiné fait mine de lui expliquer :

- C'est difficile à concevoir mais il me semble qu'elle préfère les charmes des femmes aux tiens...

Pas des femmes en général, surtout une ... Elle à beau lui "expliquer" ça comme s'il était attardé, je fais totale abstraction de ça pour me concentrer sur la manière féline qu'elle a de se déplacer, inconsciemment sensuelle...

- Mais c'est elle qui dit des choses !!

Souriante, ma kiné ignore ses protestations et me demande : 

- T'es prête, que je t'arrache à ses griffes ? 

- Plus que jamais !

On salue Baptiste et descendons les escaliers en silence. 

Arrivées à la moto, nous enfilons nos casques et Anna chevauche son engin avant de se tourner vers moi et lance :

- Tu montes ? 

Je la frappe, quasi persuadée qu'elle pensait "c'est combien?". Elle mime un air offusqué dans un :

- Qu'est-ce que j'ai fait ? 

- Tu le sais très bien. Je m'accroche où ?

Regardant droit devant, elle abaisse sa visière et j'entends :

- À moi.

En voilà une bonne nouvelle ! Pourquoi je n'ai pas insisté pour ce tour de moto auparavant ?

Sans perdre une seconde, je l'enlace, contente de pouvoir être aussi proche d'elle.

Elle démarre le moteur, pose sa main gantée sur les miennes et demande :

- Prête ?

- Plus que jamais ! 

On se met en route et le moins que l'on puisse dire, c'est que j'apprécie la balade. Je me colle autant que possible en essayant de faire en sorte que ça ne soit pas trop flagrant. La dernière des choses dont j'ai besoin, c'est qu'elle s'imagine que je tente de me faire des sensations en faisant frotti-frotta dans son dos ! 

Elle roule lentement et je lui en suis doublement reconnaissante, non seulement ça implique plus de temps dans cette position, mais ça me permet également de ne pas flipper.

On approche de chez moi et j'appréhende le moment des au revoir. Après tout je ne sais toujours pas ce qu'elle pense d'hier, si tant est qu'il se soit passé quelque chose !

Elle s'arrête à environ un pâté de maisons de chez mon immeuble, dans une petite rue déserte.

- Euh Anna ? Tu te souviens plus où j'habite ou tu comptes vendre mes organes au marché noir ?

Stoppant le moteur, elle descend de la moto et retire son casque puis le mien sous mon regard perplexe.

Je n'ose pas bouger de mon perchoir de peur de choir et d'abîmer la moto au passage.

En plus elle n'a toujours pas répondu et je commence à me demander s'il n'y a pas une part de vérité dans ma plaisanterie.

Elle passe sa main gantée dans ses cheveux et détourne les yeux, comme gênée. Incertaine, je demande d'une petite voix :

- Anna ?

- C'était beaucoup plus simple sur le papier...

Mais de quoi elle parle ?

- Me tuer et cacher mon corps dans un fourré ? C'est pour ça qu'on s'est arrêtées ici ?

Elle baisse la tête et lève juste les yeux pour croiser timidement mon regard :

- Non et non.

Elle s'avance vers moi et saisit ma main.

Les yeux dans les miens, elle se mord la lèvre avant de s'emparer des miennes dans un baiser qui me prend totalement par surprise.

Elle se recule bien trop tôt à mon goût et je peine à retenir un gémissement plaintif. C'est pas juste qu'elle ait un pouvoir pareil sur mon cœur et mon corps ! À peine un baiser et voilà que mes hormones dansent la lambada !

- Désolée mais j'avais très envie de t'embrasser et je n'étais pas sûre de pouvoir attendre jusqu'à chez toi...

C'est la meilleure nouvelle que j'ai entendue depuis longtemps. Pour donner un ordre d'idée, c'est au même niveau que l'actrice Eliza DUSHKU qui admet qu'elle pense que Faith a des sentiments pour Buffy, c'est pour dire !

- Oh mais ne t'excuse surtout pas ! Heureusement que ce n'est pas moi qui roule sinon on n'arriverait jamais !

Maintenant que je sais qu'aucun trafiquant ne va sortir de derrière un buisson pour tenter de me voler un rein, je descends précautionneusement de la moto. 

J'attire Anna dans mes bras, ayant besoin de sentir qu'elle est bien là. 

Au vu de la réaction de certaines parties de mon corps lorsqu'il entre en contact avec le sien je confirme : elle est bien là !

Elle me serre fort et j'ai la nette impression que je ne suis pas la seule qui avait envie de faire ça.

Je me recule en premier et écarte ses cheveux de son visage pour poser ma main sur sa joue. Mes yeux vont trouver les siens et on se regarde, échangeant silencieusement tous les mots qu'on ne s'est pas dit. C'est peut-être tout bête mais rien que savoir que je peux la regarder sans me cacher est quelque chose d'important à mes yeux. Bon, faut dire que c'est quelque chose que je fais beaucoup alors ça m'arrange.

Je m'approche et frôle ses lèvres des miennes, avant de les capturer dans un baiser doux qui m'étonne de moi. Ça fait des mois que je brûle d'en être là, que je rêve de ça et bizarrement maintenant que j'y suis je veux faire durer le moment, savourer l'instant. 

Après quelques minutes, on se remet en route vers chez moi. Arrivées devant la porte, je  descends et demande en désignant le casque du doigt : 

- Je le rendrais à Batou ?

- Oui si ça t'embête pas.

- Du tout.... Merci de m'avoir ramenée.

J'hésite à lui proposer d'entrer. D'un côté je n'ai pas envie de la laisser partir maintenant, de l'autre je ne veux pas passer pour la nana présomptueuse genre "salut poupée, tu passes boire un verre ? *clin d'œil entendu*". Non seulement ça fait pitié, mais ce n'est pas mon style du tout. 

Perdue dans mes pensées, j'ai failli ne pas remarquer son air gêné. 

- Anna, quelque chose ne va pas ? 

Elle baisse la tête et j'ai l'intime conviction que je ne vais pas aimer ce qui sort de sa bouche. Elle ne veut peut être pas qu'on s'embrasse en public ? 

- Je suis désolée de te demander ça mais... Est ce qu'on pourrait ne pas l'annoncer aux autres pour l'instant ? Enfin si ça ne te dérange pas...

Quelqu'un peut m'aider à ramasser mes dents s'il vous plaît ? Je viens de me prendre un vilain coup de massue à l'arrière du crâne là... 

Je détourne le regard, ne voulant pas qu'elle voie le mal que ça me fait de l'entendre dire ça. D'une voix peu convaincue, je réponds :

- Comme tu préfères. Bon... Il faut que j'y aille... À plus tard.

Je lui fais un petit sourire et m'enfuit en direction de l'immeuble sans même un bisou. Une désillusion de plus et je vais me mettre à pleurer.

Au fond, j'espérais qu'elle tente de me rattraper, mais vu que les contes de fées ne sont décidément pas pour moi, ça n'arrive pas.

Je ferme la porte d'entrée de mon appartement et m'y adosse immédiatement, me laissant glisser jusqu'au sol. Posant mes coudes sur mes genoux, je prends ma tête entre mes mains.

- Putain ! 

C'était trop beau. J'ai enfin la fille de mes rêves et je lui fais honte... Tu parles de montagnes russes.

M'enfin de toute manière je n'avais pas vraiment d'autre choix que de lui dire okay. En espérant qu'elle réalisera sous peu que ça peut vraiment le faire entre nous.

Mon téléphone vibre et le message d'Anna n'est pas celui que j'attendais :

Merci de ta compréhension, désolée de t'infliger tout ça. Bonne journée, bisous.

Honnêtement, je ne sais pas si je dois ou non me réjouir du fait qu'elle a conscience de ce qu'elle me fait endurer. Après tout, ça ne l'empêche pas de le faire.

 

*          *          *          *          *          *

 

Arrivée en avance, j'attends Anna pour notre première sortie en amoureuses.

Autant dire que j'ai orné mon calendrier d'une croix blanche ! Après la façon dont on s'était quittées, je ne savais pas comment prendre contact. Finalement c'est elle qui m'a envoyé un message. Selon moi, c'est bon signe. En même temps, selon moi, c'était sûr que j'allais finir par gouverner le monde.

Le fait que notre point de rendez-vous soit à l'autre bout de la ville est nettement moins encourageant. 

Je me demande ce qu'elle a prévu ! Boire un verre dans un bar ? Bowling ? Billard ? 

Elle se montre finalement et je n'arrive absolument pas à me retenir de la regarder de haut en bas. Comme les beaux jours sont de retour, elle porte un petit haut bleu clair et décolleté juste ce qu'il faut, avec un jean sombre et des baskets noires. Ajoutez les lunettes de soleil et me voilà séduite, simple mais efficace, tout ce que j'aime.

Elle me fait un sourire radieux et me prend dans ses bras, ce qui est de bon augure compte tenu de la manière dont on s'est quittées.

Un bisou très furtif plus tard, nous nous mettons en route. 

- On va où ?

- Si je te le dis ce ne sera plus une surprise...

- Pas grave ça ! Alors ?

Elle entrelace ses doigts aux miens et me lance dans un clin d'œil :

- Viens, tu vas vite comprendre.

Et effectivement, après même pas deux minutes de marche j'aperçois la grande roue. Toute contente, je me presse pour être devant et me tourne pour lui faire face, avançant à reculons :

- On va à la fête foraine ? Trop bien ! 

- Tu as toujours été aussi perspicace ou t'as développé ça à mon contact ?

- Très drôle. N'empêche que c'est trop mignon, comme dans les films. 

Mon compliment semble lui faire plaisir et elle me fait un sourire radieux en s'approchant du premier stand.

Je m'égare un instant, regardant sa silhouette avec un mélange de joie et d'incrédulité. J'en reviens pas d'en être enfin là avec celle que j'ai tant convoitée ! Mon premier rencard avec Anna. :) :)

Reprenant mes esprits, je me presse dans son dos en disant d'un ton joueur :

- Tu fais quoiiiii ?

Elle fait volteface et m'offre une pomme d'amour : 

- Comme dans les films !

Mon sourire est tellement grand qu'elle a dû entrapercevoir à coup sûr mes dents de sagesse. Je ne perds pas un seul instant avant de croquer dedans joyeusement.

La joie s'en va avec au moins la moitié de mes dents. 

J'avais légèrement oublié que ces délicieuses petites choses peuvent être plutôt dures. Et par "plutôt dures", j'entends acier trempé recouvert de béton armé "dur".

Mes yeux vont se poser sur le fruit et je suis étonnée qu'aucune de mes quenottes ne la décore. Apparemment, c'était une impression uniquement sensorielle ! 

Plissant les yeux, je lance un regard accusateur à Anna :

- Aurais-tu un penchant gérontophile, préférant les édentées ? 

- Oh que oui... Tu me parais encore plus attirante maintenant...

Ce faisant, elle enroule sa main autour de la mienne.  Ses yeux soutiennent mon regard tandis qu'elle amène la pomme d'amour à ses lèvres. Ses dents percent la couche de caramel avec aisance, ses lèvres venant se poser sur la morsure comme une douce caresse. Le jus du fruit humidifie sa bouche, ses yeux n'ont pas quitté les miens et je crois que je viens d'avoir un mini orgasme rien qu'à l'observer manger une pomme.

Voilà voilà !

Ça, c'est fait. 

Ça promet !

J'essaie de parler, mais émets uniquement une sorte de miaulement plaintif et je dois tousser pour retrouver la parole : 

- Si ton but est de mettre fin à mes jours, surtout continue comme ça !

Elle se mord la lèvre et tente de me porter le coup de grâce en annonçant d'un air entendu :

- Reste avec moi, j'ai d'autres plans pour toi. 

Immédiatement, mon esprit pervers me fournit 12 millions de scénarios qui me plaisent plutôt bien. 

Tout sourire, je demande : 

- Du genre ? 

Elle s'empare de ma main et m’entraîne en direction des manèges.

- Tu verras. 

N'osant pas me lancer sur un sujet glissant étant donné les épreuves que vient de subir mon cœur, j'amène la pomme d'amour à mes lèvres pour m'occuper la bouche et les pensées.

Bien qu'elle m'ait lâché la main, Anna marche assez proche de moi et je suis heureuse de constater qu'elle ne me fait plus me sentir comme une lépreuse. J'ai l'impression que celle qui m'a envoyé le texto de l'autre jour n'a plus rien à voir avec la personne que j'ai en face de moi. 

Ok, il n'y a pas de réels signes d'affection en public (tant mieux, car ce n'est pas mon truc) mais je n'ai pas non plus l'air de la pestiférée de service. 

- La grande roue ça te dit ?

Acquiesçant d'un mouvement de tête, je ne peux pas m'empêcher de la taquiner :

- J'en connais une qui met les petits plats dans les grands pour me séduire...

J’anticipe une réplique cinglante et suis totalement prise au dépourvu par sa réponse :

- J'ai suffisamment attendu ce moment pour vouloir faire ça bien...

Là je me sens comme un fondant au chocolat. De l'extérieur je fais ma dure mais je suis totalement liquéfiée en mon cœur. 

Une chaleur qui ne m'est malheureusement pas étrangère se fait sentir au niveau de mes joues. 

J'ai l'impression d'être une adolescente prépubère qui irait à son premier rencard avec le gars le plus cool de son collège : d'un côté c'est génial et de l'autre on espère plaire !

Il n'y a pas beaucoup de queue et c'est vite à notre tour d'embarquer dans la cabine. Au moment où la porte se referme sur nous, Anna est prise d'un doute :

- Je ne t'ai même pas demandé, t'as pas le vertige au moins ?

Mon esprit tordu me sort le refrain (et d'ailleurs la seule partie que je connaisse) de la vieille chanson "vertige de l'amour". Me retenant de chanter pour éviter que notre soirée ne soit écourtée pour avis de pluies diluviennes, je me contente d'un :

- Non, je te l'aurais dit avant ne t'en fais pas !

- Ça va alors.

La grande roue se met en mouvement et nous montons lentement. Le soleil est en train de se coucher et le spectacle est juste superbe. Me plaçant un peu en retrait, je fais d'une pierre deux coups ; je profite ainsi d'une vue sur les toits de la ville sublimés d'une lueur jaune orangée et du profil d'Anna, appréciant visiblement le tour.

Elle est totalement captivée par le paysage, mais arrive néanmoins à m'arracher un sourire en s'emparant de ma main, entremêlant nos doigts.

Une fois au sommet, elle la serre légèrement pour capter mon attention et se penche pour déposer un baiser sur mes lèvres.

Ne voulant pas que ce moment s'arrête, je l'attire un peu plus à moi, approfondissant le baiser. Se prenant visiblement au jeu, son autre main vient caresser la jonction de ma nuque et mes cheveux. Bien qu'elle ne fasse pas pression, ce simple geste me rassure énormément, c'est bon de sentir qu'elle en a tout autant envie que moi et que lorsque l'on est que toutes les deux ses barrières tombent.

Voulant reprendre mon souffle, je me recule légèrement et vais croiser son regard. Toutes les choses qui ont pu se passer entre nous et mes éternels doutes sont balayés par l'affection sincère que j'y vois.

Me souriant, je suis gratifiée d'un autre bisou avant qu'elle ne se tourne pour continuer son observation. Comme pour me prouver à moi-même que j'ai le droit d'initier des gestes tendres, je glisse mon bras dans son dos, caressant son épaule du bout des doigts.

Non seulement ça ne relève pas de l'interdit, mais en plus elle vient se coller à moi : jackpot !

La tentation étant trop forte, je sors mon téléphone pour immortaliser l'instant.

Voyant cela, Anna s'exclame :

- Hey ! Et mon droit à l'image ?

Tout sourire, je me tourne vers elle et annonce :

- Totalement bafoué !

Ce faisant, j'appuie sur le bouton et le bruit caractéristique de l'appareil photo se fait entendre.

Son regard vient accrocher le mien et je mitraille à nouveau, cherchant clairement à la faire râler tout en accumulant les clichés. Win - win !

Ses yeux se plissent et elle demande :

- Et tu comptes faire quoi du millier de photos que tu es en train de prendre ?

D'un ton joueur, je fais mine de peser le pour et le contre :

- Te faire chanter ou les garder en souvenir... Entre les deux mon cœur balance.

- Je vois... Dans ce cas, il vaut mieux qu'elles soient réussies, avec des plans pareils il ne faut pas de clichés en demi-teinte.

Me prenant par surprise, elle m'embrasse et alors que je suis totalement distraite par ses fourberies, elle cherche à s'emparer de mon téléphone.

Du moins c'est ce que je crois jusqu'à ce que le petit bruit m'informe qu'une nouvelle photo a été prise.

Toute fière d'elle, elle se recule en me laissant comme une carpe hors de l'eau et demande :

- Ça fera l'affaire ?

J'amène mon smartphone à mes yeux et si la danse de joie que j'ai envie de réaliser en observant le cliché est une indication quelconque, ça fait même plus que l'affaire.

Même en ayant les yeux fermés, la photo est réussie, le bisou est relativement chaste et se trouve presque éclipsé par le superbe tableau des bâtiments baignés dans la douce lumière du soleil couchant.

- Dis donc, tu m'avais dissimulé tes talents de photographe !

Se frottant les ongles sur son épaule d'un air détaché elle rétorque :

- Oh tu sais je ne peux pas te faire la liste de mes innombrables talents cachés, ça nous prendrait trop longtemps !

- Bah voyons !

Trop occupées à discuter, nous sursautons toutes les deux lorsque le type du manège ouvre la porte. Je descends, contente du déroulement de la soirée jusqu'à présent.

On marche le long des stands quand mon attention est happée par une petite peluche tortue ninjas  à un jeu de chamboule tout.

Ayant conscience d'avoir passé l'âge, je m'efforce de continuer mon chemin devant l'air de rien, mais ma discrétion naturelle est telle qu'Anna met 10 secondes à me demander laquelle me fait envie.

D'un côté je ne souhaite pas m'humilier et risquer qu'elle se moque de mes goûts, de l'autre... Bah je le voudrais vraiment bien ce nounours.

D'une toute petite voix, j'annonce donc en pointant du doigt :

- La tortue ninja... Mais dans ces trucs là on arrive jamais à avoir de peluche à moins de dépenser une fortune.

Si elle se moque intérieurement, elle cache bien son jeu et se contente de s'approcher du stand en tendant un billet au commerçant.

- Anna. T'es pas obligée hein !

Prenant les balles qui lui sont données, elle m'adresse un sourire et dit :

- Je sais, mais j'en ai envie. En plus elle est petite et ne coûte pas beaucoup de points.

Elle s'applique et fait un strike, me faisant un clin d'œil complice avant d'ajouter :

- Et je vise plutôt bien.

Cinq minutes plus tard, c'est fière comme un paon que je parcours la fête foraine avec la plus belle fille au bras ET la plus belle peluche dans les bras. J'ai trop la classe.

Je suis de ces nanas qui regardent les films romantiques avec envie en se disant qu'on a jamais eu cette chance nous, du coup même si c'est super cliché, je suis ravie du déroulement de la soirée.

 

*          *          *          *          *          *

 

Deux heures plus tard, Anna me dépose devant l'immeuble et je la regarde s'éloigner le sourire aux lèvres. Ce premier rencard n'aurait pas pu mieux se passer.

À peine rentrée, je m'affale sur le canapé, peluche en main. 

Je la serre contre moi et soupire de bonheur. Je sais bien qu'elle vient à peine de partir, mais je ne peux pas résister à la tentation d'envoyer un message à Anna quitte à émécher un peu plus mon côté "cool" déjà fortement diminué.

Voulant qu'elle aussi ait un cliché de moi mais sans pour autant apparaître présomptueuse, j'envoie à Anna une photo de nous deux côte à côte dans la grande roue, l'accompagnant d'une petite légende :

Après une longue réflexion, j'ai finalement retenu l'option souvenir, tant pis pour l'argent.

Sa réponse ne se fait pas attendre :

Madame est trop bonne ! Je note cependant que tu ne me laisses même pas profiter du fruit de mon talent !

C'est peut être bête, mais je suis vraiment heureuse qu'elle me demande la photo du bisou.

Ne me faisant pas prier, je lui envoie le cliché en question :

Je compte sur toi pour ne pas me retrouver en couverture de Closer d'ici demain !

Contente de moi, je réunis ce qu'il me reste d'énergie et pars me doucher.

En sortant de la salle de bain, je remarque que j'ai reçu un autre message d'Anna.

En lisant son mms, j'éclate de rire. Elle a pris la photo que je viens de lui envoyer et a ajouté un encadré rose "closer" dans le coin haut gauche, avec en gros titre sous la photo:

Inès, son baiser volé.

Elle a même été jusqu'à préciser la date et le prix.

La légende fait également son petit effet puisqu'on peut y lire :

Un deuxième rendez-vous ou cette photo fera le tour des tabloïds dès demain !

Je tapote rapidement ma réponse :

Tu ne me laisses pas d'autre choix que d'accepter ! Plus sérieusement, merci encore pour cette soirée, je me suis bien amusée. J'ai déjà hâte de te retrouver...

Avant d'envoyer le message, je marque une légère pause, hésitant... Même si ma dernière phrase est sincère et que ça fait plusieurs mois qu'Anna et moi sommes "amies", j'ai toujours peur d'aller trop vite...

Oh et puis merde, ce n'est pas comme si c'était une inconnue que je venais de rencontrer.

Pressant le bouton envoi avant de changer d'avis, j'attends sa réponse non sans trépigner.

Lorsque la sonnerie retentit, je manque de faire choir mon téléphone dans mon empressement :

Le plaisir était largement partagé, je te l'assure. C'est maintenant que je me dis que la patience n'est peut-être pas une vertu, parce que si j'avais su comment ça allait se passer, je n'aurais pas pu attendre tout ce temps pour t'inviter. :p T'es libre après demain soir ? (Je sais que t'as rdv avec mon couz demain mais je vise la courte échéance pour se revoir !)

En lisant cela, mon sourire devient immense. Je suis passée à deux doigts de me fouler un muscle maxillo-facial, c'est sûr ! Je m'empresse de verrouiller le message pour qu'il ne puisse pas être supprimé par erreur. Limite je l'imprime !

Laisse-moi consulter mon agenda de ministre... Mhhh oui je devrais pouvoir te trouver un petit créneau.

Nickel ! Par contre si tu veux bien m'excuser je vais aller me coucher, je suis crevée. Fais de beaux rêves. Je t'embrasse.

Pas de prob. Bonne nuit à toi aussi et gros bisous :*

Ravie de ma soirée, je termine de me sécher et me glisse sous les draps. Pas de doute, mes rêves vont être bons.

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